Tendinite de De Quervain
De quoi parle t-on ?
Les patients atteints de la tendinite de De Quervain ont des douleurs sur le côté du poignet (Figure 1).
Figure 1 : Douleur du poignet dans la tendinite de De Quervain
Les tendons sont la continuité d’un muscle et agissent comme des cordes (par l’action de contraction du muscle) pour mobiliser les os et effectuer des mouvements. On explique l’action des tendons aux patients en donnant comme image une marionnette dont les membres sont articulés par l’action de fils tenus par le marionnettiste. Les tendons sont donc comme les fils d’un pantin qui permet à nos membres de bouger. Vous pouvez voir les tendons sur le dos de votre main lorsque vous redressez vos doigts.
Figure 2 : Représentations anatomique et didactique des tendons extenseurs sur le dos de la main.
Dans la tendinite de De Quervain, le tunnel (le premier compartiment extenseur; voir la figure 1A-B) dans lequel coulisse les tendons se rétrécit. D’autres fois, ce sont les tissus (les tendons par exemple) qui composent le tunnel qui s’épaississent. Parfois ces 2 phénomènes sont associés.
Figure 3 : Représentation anatomique de l’origine de la tendinite de De Quervain. Les tendons sont enflammés et se coincent sous le ligament annulaire.
Dans tous les cas, cela s’apparente à un problème de contenu/contenant et aboutit à un frottement anormal entre les tendons et les parois du tunnel. Ce frottement s’aggrave lors des mouvements du poignet et du pouce qui devient douloureux, en particulier lorsque vous saisissez ou tordez avec force.
Les causes
Cette affection concerne classiquement la femme à des périodes de perturbations hormonales (grossesse, post-partum, ménopause). On imagine qu’il existe une « imprégnation hormonale » des tendons qui s’épaississent et coulissent difficilement dans le tunnel. Pour la petite histoire, on attribuait cette tendinite chez les femmes venant d’accoucher au fait de devoir essorer les couches en tissu et à la façon de tenir le bébé. On sait désormais que cela est davantage en lien avec les modifications hormonales. Les mouvements fréquents et répétés du pouce, ou plus précisément de la pince pouce index chez les couturières, mécaniciens, kinésithérapeutes, secrétaires, représentent une cause favorisante de cette tendinite (Figure 4).
Figure 4 : Activités professionnelles pouvant entraîner une tendinite de De Quervain
Signes cliniques
Les patients décrivent souvent une sensation d’inflammation, même si des études ont montré que le processus n’est pas inflammatoire. La douleur est électivement située sur le côté du poignet (bord latéral) d’apparition progressive mais parfois assez brutale (Figure 5). Cette douleur devient vite gênante dès la mobilisation du pouce et pour des gestes simples de la vie quotidienne (ouvrir une bouteille, tourner une clé dans une serrure…). Il existe souvent une irradiation de la douleur sur le bord de l’avant bras.
Figure 5 : Douleur située sur le bord radial du poignet
Il existe fréquemment une tuméfaction ou un oedème en regard de la zone douloureuse. La manoeuvre de Finkelstein (Figure 6) est pathognomonique de cette pathologie, en d’autres termes, si elle est négative, cela remet en question le diagnostic de tendinite de De Quervain.
Figure 6 : Le Finkelstein test pathognomonique de la tendinite de De Quervain
Elle se pratique en effectuant une inclinaison ulnaire du poignet, pouce positionné à l’intérieur de la main et recouvert par les autres doigts qui sont fléchis. Cette manœuvre est positive lorsqu’elle reproduit à l’identique les douleurs ressenties par le patient et signe donc le diagnostic de tendinite de De Quervain.
Les examens complémentaires
Aucun examen complémentaire n’est nécessaire pour poser le diagnostic de tendinite de De Quervain. La radiographie standard du poignet est le plus souvent normale. Une échographie peut confirmer l’inflammation tendineuse du premier compartiment des extenseurs. L’IRM est parfois prescrite dans les cas litigieux ou à la recherche d’une lésion du tendon de type fissuration (Figure 7). Cet examen onéreux ne doit pas, en principe, être prescrit pour une affection que l’on diagnostique avec un simple examen physique du patient.
Figure 7 : Inflammation importante (flèches rouges) située en regard du premier compartiment des extenseurs confirmant le diagnostic de Tendinite de De Quervain
Traitement
Abstention
Il existe parfois des améliorations spontanées. Mais la douleur peut devenir chronique empêchant toute activité professionnelle
Traitement médical
Le traitement médical est efficace dans la majorité des cas (80% de bons résultats dans certaines séries). Il consiste en :
- Une mise au repos du pouce (arrêt des circonstances favorisantes),
- Des anti-inflammatoires par voie orale,
- Une attelle de repos stabilisant le poignet et le pouce à porter uniquement la nuit, voir des « tapes » positionnés la journée sur la zone douloureuse (Figure 8).
Figure 8 : Différents traitements proposés pour soulager les douleurs ; exemple de taping sur l’image de haut et attelle sur mesure sur la photographie du bas.
Une à 2 infiltrations de corticoïdes (Figure 9) dans le tunnel dans lequel les tendons frottent (1ercompartiment des extenseurs). Elles peuvent se réaliser « à l’aveugle » ou sous contrôle échographique. L’injection permet de diminuer le volume des extenseurs et diminution la membrane qui s’est constituée autour, et donc de favoriser le coulissement des tendons.
Figure 9 : Infiltration de corticoïdes dans le premier compartiment des extenseurs du poignet.
La reprise du travail sera de toute façon aménagée et l’appareillage la nuit conservé 3 mois au total. Le traitement chirurgical sera proposé dans les formes rebelles malgré un traitement médical bien conduit.
Traitement chirurgical
L’intervention est pratiquée sous anesthésie locorégionale (uniquement du bras), en chirurgie ambulatoire (le patient ne dort pas à la clinique). Elle se réalise par voie mini-invasive par une courte incision transversale de 2 cm (Figure 10).
Figure 10 : Courte incision cutanée nécessaire pour le traitement chirurgical d’une tendinite de De Quervain
On ouvre le tunnel dans lequel les tendons sont « coincés » et la membrane pathologique autour des tendons est retirée (Figure 11). On vérifie toujours que les tendons coulissent parfaitement.
Figure 11 : Illustration de l’encombrement inflammatoire des tendons dans la tendinite de De Quervain et de l’ouverture du compartiment lors du traitement chirurgical (photographie du bas)
Assez fréquemment on retrouve une anomalie anatomique qui explique la persistance de la symptomatologie comme un dédoublement du tunnel qui est compartimenté par une membrane anormale (une cloison fibreuse) qui sera également retirée.
Figure 12 : Discrète cicatrice chirurgicale juste au décours de la chirurgie
Nous n’immobilisons pas le poignet ou le pouce après l’intervention mais confectionnons un pansement que le patient gardera au plus 6 jours. Six semaines sont souvent nécessaires à la disparition complète de la douleur.
Cas particulier de la tenosynovite sténosante de De Quervain
Dans ce cas précis, il existe un blocage complet du poignet qui ne peut pas se mobiliser en inclinaison ulnaire. Les tendons sont complètement coincés dans le tunnel et toute tentative d’infiltration est alors vouée à l’échec. Dans ce cas précis, une intervention chirurgicale de libération tendineuse équivalente à celle décrite précédemment est proposée en première intention.
Au total
Cette tendinite apparait les plus souvent chez la femme avec ou sans activité professionnelle sollicitant le pouce et guérit la plupart du temps à l’aide d’un traitement médical. Néanmoins dans les formes rebelles au traitement médical, le traitement chirurgical donne d’excellents résultats. Dans les formes majeures avec une tuméfaction importante et un blocage en inclinaison ulnaire, le traitement chirurgical peut être proposé d’emblée.